Tensions autour de Ligue 1+ : les révélations de Daniel Riolo secouent la LFP
Jeudi, au cours du conseil d’administration de la Ligue de football professionnel (LFP), des désaccords ont émergé avec une rare intensité — désaccords que l’éditorialiste Daniel Riolo, sur l’After Foot (RMC), interprète comme le signe d’« une manœuvre » visant à fragiliser la nouvelle chaîne Ligue 1+, lancée cet été, et de façon à la faire « disparaître ».
Des crispations déjà perceptibles
Selon Riolo, les tensions observées ne seraient pas de simples divergences de stratégie ou de gouvernance, mais bien des logiques de pouvoir en embuscade. Il incrimine certains acteurs influents du football français — notamment Nasser Al-Khelaïfi (président du PSG) et Olivier Létang (président du LOSC) — qu’il soupçonne de travailler à l’affaiblissement du projet.
Dans ses propos, Riolo souligne que la volonté de la LFP de reprendre la main sur la diffusion du championnat — via une chaîne propre — ne plairait pas à tous, surtout à ceux historiquement impliqués dans l’écosystème des droits télévisés.
« On ne veut surtout pas vous filer les droits »
L’un des points de crispation relevés par l’éditorialiste porte sur l’attribution des droits de diffusion des matchs des Espoirs. Riolo affirme que Philippe Diallo, président de la Fédération française de football (FFF), aurait choisi de ne pas attribuer ces droits à Ligue 1+, « pour ne pas froisser beIN Sports ».
Selon lui, Diallo, dans le cadre de négociations en cours avec beIN Sports concernant la Coupe de France, aurait voulu ménager ses interlocuteurs du Qatar, évitant ainsi d’octroyer un levier médiatique à la nouvelle chaîne de la LFP :
« Parce qu’il est en négociation avec beIN Sports … on va filer ça ailleurs, mais surtout pas à vous (à Ligue 1+) »
Cette décision serait symptomatique, pour Riolo, du combat que mènent certains acteurs ◾pour limiter l’influence de Ligue 1+.
◾Le contexte difficile de Ligue 1+
Lancée le 1ᵉʳ juillet 2025 par LFP Media, Ligue 1+ est le nouveau service de streaming dédié au championnat français. La chaîne diffuse huit matchs sur neuf par journée (le match du samedi à 17 h restant provisoirement à beIN Sports).
◾L’objectif est clair : rompre avec le modèle de redistribution des droits à des diffuseurs externes exclusifs notamment Canal+ et redonner une partie du contrôle à la LFP.
Mais le chemin est semé d’embûches. Le choix d’une diffusion non exclusive (via les opérateurs, plateformes, etc.) et l’échec des pourparlers avec Canal+ compliquent la trajectoire du projet. Certains présidents de clubs expriment déjà leurs craintes vis-à-vis de la baisse des revenus issus des droits télévisés.
Peut-on parler de machination ?
L’accusation portée par Riolo à savoir une tentative de « couler » Ligue 1+ n’est pas isolée dans le monde du football médiatique. Plusieurs sources évoquent une forme d’« entente » ou de coalition d’intérêts entre anciens diffuseurs (notamment Canal+) et beIN Sports, prêts à pousser contre le nouveau venu pour préserver leurs positions.
Il est cependant difficile, à ce stade, de vérifier si ces manœuvres relèvent d’un plan concerté ou de réactions individuelles face à un bouleversement du modèle économique.
Enjeux et questions à venir
◾Survie économique : le modèle de Ligue 1+ repose sur un succès d’abonnés suffisant pour compenser l’optimisation des revenus par rapport aux anciens contrats de droits.
Alignement des intérêts : la LFP devra réussir à embarquer la majorité de ses clubs dans ce projet, sans laisser les plus influents tirer les ficelles dans leur coin.
◾Transparence et gouvernance : face à des accusations de manœuvres en coulisses, la LFP sera encouragée à faire preuve de plus de clarté sur les décisions stratégiques et les attributions de droits.
◾Résistance institutionnelle : à quel point les acteurs établis, comme beIN Sports ou Canal+, peuvent-ils ou veulent-ils accepter une brèche dans leur pré carré ?
En filigrane des tensions visibles jeudi se dessine un bras de fer majeur sur l’avenir de la diffusion du football français. Si la chaîne Ligue 1+ est à ce jour une réalité, son destin dépendra dans les mois à venir de sa capacité à résister aux pressions extérieures — politiques, économiques, médiatiques — et à convaincre qu’elle peut incarner la nouvelle voie du football français.